l’alimentaire face aux psychoses

Dioxine, vache folle, listéria… Devient-il risqué de manger? Les consommateurs sont en pleine défiance. Producteurs, industriels, transporteurs, restaurateurs, etc. à tous les bouts de la chaîne, ils sont au premier rang des accusés. Pas d’inquiétude inutile, les contrôles vous protègent. Dossier réalisé par Anne Herriot

Repères

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De plusieurs milliers par an au début du XX ème siècle, le nombre d’accidents alimentaires est tombé à une centaine ces dernières années.

46%

Des consommateurs accordent une grande importance à l’origine des produits et 41% des consommateurs à la composition des produits.

 

Selon une enquête réalisée par Ipsos en automne dernier, 70% des consommateurs sondés se disent inquiets de ne pas réussir à se procurer une alimentation saine pour leur santé. Ils ne dénoncent pas tant la qualité des produits que le manque d’informations sur ce qu’ils consomment (62%). Vache folle en 1996, poulet à la dioxine en 1999, graines germées à la bactérie E. coli, mozzarella à la dioxine et lait maternel chinois frelaté en 2008, porc transformé en bœuf et pastèques chinoises explosives en 2011, steaks hachés à la bactérie E. coli en 2012, lasagnes à la viande de cheval en 2013, ce sont là quelques-uns des pires scandales alimentaires des vingt dernières années. Qui nourrissent incontestablement la défiance des Français face à l’industrie agroalimentaire.

Maîtrise des risques et validation des contrôles

Il faut dire qu’aujourd’hui, 80% de nos aliments proviennent d’une usine et sont issus de matières premières traitées, transformées et recomposées. Il est vrai aussi que le secteur agroalimentaire transforme 70% de la production agricole française. En d’autres termes, le consommateur a le sentiment de ne plus contrôler ce qu’il met dans son assiette, malgré le fait que la réglementation impose désormais aux producteurs, pour plus de transparence, d’indiquer sur les étiquettes la dénomination de vente du produit, la liste des ingrédients (dont les additifs), l’identité de l’atelier de fabrication, le numéro de lot de fabrication, la quantité nette, la date limite d’utilisation optimale (DLUO) ou la date limite de consommation (DLC) et, enfin, le mode et les précautions d’emploi. Aussi méfions-nous des idées reçues. Les risques alimentaires sont statistiquement moins nombreux que par le passé. La vigilance s’impose cependant; en effet, une bactérie pathogène telle que L. monocytogenes peut être à l’origine de listériose humaine, qui présente un taux élevé de mortalité. Pour expliquer cette amélioration, on peut noter une meilleure connaissance des maladies, une meilleure maîtrise technologique par les entreprises, une dynamique de recherche-développement et enfin un contrôle accru des produits alimentaires, qui s’effectue à différents niveaux. Seulement voilà, le consommateur moderne a tendance à ne plus tolérer aucun risque. Quant à la médiatisation, si elle a pour avantage d’informer et de prévenir, elle a aussi pour effet d’amplifier et de dramatiser les événements. La réalité n’est pas toujours celle que l’on imagine. Une chose est déjà sûre, les progrès scientifiques et techniques ont considérablement réduit certains risques alimentaires. L’arrivée en masse dans les foyers des réfrigérateurs et des congélateurs en est un bel exemple. Ce n’est pas tout. Les pouvoirs publics veillent sur la santé publique des consommateurs via des réglementations, des contrôles sur les produits agricoles, les industries et les produits finis. Ils appliquent même parfois le principe de précaution dans l’attente de réponses scientifiques afin de minimiser les risques potentiels. Et le professeur Éric Marchioni* d’ajouter: «les crises sont parfois des psychoses qui n’ont aucune incidence réelle sur la santé. Ce fut le cas des traitements ionisants des aliments, une belle technique qui décontamine les aliments sans les chauffer. Nous étions en France les leaders et nous avons dû abandonner cette technologie, car la législation européenne a imposé un étiquetage beaucoup trop contraignant qui effraie les services de la grande distribution. Désormais, elle explose en Chine et en Corée!» À tort ou à raison depuis vingt ans et suite aux différentes crises sanitaires, le monde de l’agroalimentaire est de plus en plus réglementé. En France, plus de 8000 personnes œuvrent à cette mission de surveillance sanitaire aux ministères de la Santé, de l’Agriculture et de l’Économie.

Test de présence de bactéries dans une usine du groupe agro-alimentaire Bazin © Jean-François Badias

Une Alsace qui anticipe

Quand bien même les normes se multiplient, la vigilance est permanente et les contaminants potentiels infinis. «Il n’y en a pas un plus à la mode que l’autre!», souligne Stéphane Droit, ingénieur qualité chez Alsace Qualité. Et de poursuivre: «En Alsace, nous n’avons pas attendu les années 2000 et les crises pour travailler sur les normes de qualité. Alsace Qualité œuvre depuis 1991 pour accompagner les entreprises vers des démarches qualité. Aussi, quand les normes de sécurité des aliments sont tombées, elles ont été mises en applications très rapidement chez nous, plus que dans d’autres régions. Alsace Qualité a proposé aux entreprises des formations, des audits, des échanges d’expériences. Nous avions anticipé et nous poursuivons dans ce sens.» Le risque zéro n’existant pas, chaque industriel doit en effet anticiper et s’auto-responsabiliser.

Infos+

Chiffres clés


. Plus de sept consommateurs sur 10  (72,4 %) s’inquiètent de la sécurité alimentaire des produits (enquête Kantar Worldpanel)

. 97,6 % de la population achètent des surgelés

. Chute en 2013 de 2,2 % (en volume) des ventes en surgelés

. Pour 80 % des consommateurs, les labels constituent un gage de réassurance

. 2 402 avertissements adressés par des contrôleurs sanitaires à des restaurants alsaciens, en été 2013, c’est 800 de plus qu’à l’été 2012.

. Plus de 8 000 personnes sont en charge de la surveillance sanitaire en France

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