Crise du logement neuf : les métiers du bâtiment en danger

Président | CCI Alsace Eurométropole

Directeur de la Communication | CCI Alsace Eurométropole

Maisons individuelles en construction
―© Stock AdobeLa crise du logement neuf est-elle conjoncturelle ?
Nous sommes dans une situation sans précédent : a minima 450 000 logements devraient sortir de terre chaque année pour répondre aux besoins de la population française, mais seuls 373 000 ont été autorisés à la construction en 2023. Ce nouveau coup de frein pourrait s’amplifier au fil du temps, au regard de la « désolvabilisation » de la demande. Le taux moyen du crédit immobilier est passé de 1,06 % en janvier 2022 à 4,15 % aujourd’hui et avec le durcissement des conditions d’octroi des prêts, de nombreux Français ont reporté leur projet. L’impact sur les 10000 entreprises alsaciennes du bâtiment, leurs cotraitants et les 18000 artisans du secteur, qui font vivre plus de 100 000 salariés, est préoccupant. Sans parler des conséquences sociales d’un marché de la location de plus en plus tendu, pénalisant les étudiants et les travailleurs en mobilité.
Comment en est-on arrivé là ?
Les coûts de la construction ont augmenté avec la crise du prix des matériaux, aggravée par la guerre en Ukraine et l’explosion du prix des énergies. S’y ajoutent les coûts engendrés par la mise en place de la nouvelle réglementation thermique. L’inflation des derniers mois, l’abandon programmé du dispositif Pinel et le recentrage du prêt à taux zéro sur les métropoles (moins de 10 % du territoire national) viennent enfoncer le clou. Sans compter que le prix du foncier augmente toujours. L’objectif zéro artificialisation nette des sols (ZAN) soutient cette hausse et soulève de sérieuses inquiétudes pour l’aménagement de nos territoires, dans le monde économique, mais aussi dans celui des collectivités. Comment faire pour accueillir de nouvelles activités génératrices d’emplois? C’est un sujet qui devra être remis sur la table.
Quelles actions menez-vous ?
Nous avons lancé l’alerte dès les premiers signes d’un ralentissement et avons adressé un courrier au ministre délégué à la Ville et au Logement en novembre 2022, réclamant une politique publique de soutien à l’investissement. Puis nous avons interpellé le président de la République - avec mes collègues de la Chambre de Métiers et de la FFB* - lors de sa visite de l’entreprise Mathis à Muttersholtz, en avril dernier. Aujourd’hui nous poursuivons le combat avec le réseau CCI France et nos chefs d’entreprises, fortement engagés dans des organisations professionnelles de la promotion immobilière et du bâtiment. Nous ne cessons de tirer la sonnette d’alarme ! Nous appelons aussi nos élus locaux à stimuler la production de logements aidés et privés sur leurs territoires: en favorisant la mise sur le marché de terrains et en développant l’offre de logements intermédiaires qui déclenchera rapidement des ouvertures de chantiers et permettra aux classes moyennes de se loger.
* FFB : Fédération Française du Bâtiment