Transmettre son entreprise ? Pas si simple !

Le chiffre interroge. Plus d’un quart des entreprises à céder disparaissent faute de repreneurs. La pandémie et ses incertitudes n’ont pas amélioré la situation en contraignant les dirigeants et les potentiels repreneurs à l’attentisme. Or, dans ce domaine, plus que tout autre, l’anticipation et la préparation sont déterminantes. « On ne vend pas une entreprise comme on vend un appartement ou une voiture, insiste Marie-Paule Sturm-Gilardoni, responsable Cession d’Entreprises à la CCI. Il faut s’y prendre au moins cinq ans avant la cession, sinon plus. » L’enjeu est national : la bonne transmission des PME, en grande majorité familiales, au sein du tissu économique français permet d’éviter une perte de savoir-faire tricolore qu’entraînerait le rachat par un concurrent étranger ou la disparition pure et simple de l’entreprise. Depuis deux ans, grâce à la reprise économique post-covid, les valorisations des entreprises atteignent des sommets. Et avec la loi de finances 2022, l’État a encore assoupli le cadre légal de la transmission des entreprises. « Nous constatons une nette augmentation de la valeur moyenne des entreprises transmises, souligne Lucas Fattori, directeur du cabinet Michel Simond spécialisé dans la cession de commerces et de TPE/ PME. L’Alsace est une des régions qui affiche un taux de rotation parmi les plus faibles de France. L’envie de changement des jeunes dirigeants constitue aussi un motif de cession de plus en plus récurrent. L’entreprise est en bonne santé, mais l’exploitant a l’impression d’être allé au bout de ce qu’il pouvait découvrir. Vendre permet alors de sécuriser son patrimoine et de s’accorder un temps de pause avant d’engager une nouvelle aventure. Nous sommes entrés dans l’ère des multi-vies entrepreneuriales. »
La fiscalité comme première boussole
Transmettre, oui mais à qui ? Le terme recouvre des réalités bien différentes selon que l’on parle de cession à un tiers, extérieur à l’entreprise, qui représente 80 % des opérations ou bien que l’on évoque la transmission à un ou plusieurs membres de la famille du dirigeant ou à ses salariés. Parallèlement, le marché n’est pas le même selon qu’il s’agisse de la vente d’un commerce de proximité pour lequel on identifie en moyenne quatre à cinq vendeurs pour un acheteur quand, pour toutes les autres catégories, le rapport est plutôt d’un vendeur pour quatre acheteurs. Et quand la décision de vendre est prise, l’âge du capitaine n’est pas l’unique boussole. La fiscalité est aussi très importante car elle va rapprocher l’acquéreur et le vendeur sur le prix.
Sur ce point, le pacte Dutreil est généralement considéré comme une avancée majeure, notamment lorsque le dirigeant de l’entreprise la cède à un membre de sa famille. Il bénéficie alors d’un abattement fiscal pouvant aller jusqu’à 75 % de la valeur de l’entreprise. Cet abattement est également cumulable avec une réduction de 50 % des droits de donation si le dirigeant donateur a moins de 70 ans et est en pleine propriété de l’entreprise. La maîtrise des mécanismes fiscaux pour valoriser au mieux l’entreprise et limiter l’impact fiscal de la transmission, l’ajustement du prix de la cession, mais aussi la rencontre entre le cédant et le repreneur qui doit s’inscrire dans une relation de confiance : autant de paramètres qui demandent une anticipation et un accompagnement par une équipe d’experts pluridisciplinaire. « C’est notre rôle de conseiller les dirigeants, d’identifier des repreneurs potentiels, de faciliter la mise en relation et in fine de créer les conditions du succès de l’opération de transmission, reprend Marie-Paule Sturm- Gilardoni. Nous organisons dans les territoires les forums de la transmission d’entreprise et avons mis en place le Réseau Transmettre et Reprendre Alsace associant expertscomptables, avocats, Fédération Bancaire Française (FBF), notaires, Bpifrance et Chambre de Métiers d'Alsace (CMA). L’information et la sensibilisation du dirigeant sont au coeur de notre action qui se prolonge par un audit et un diagnostic pour évaluer la valeur de l’entreprise.
Puis vient la phase de recherche active d’un acquéreur parmi un portefeuille de repreneurs en quête d’un projet de création d’entreprise ou de croissance externe pour intégrer de nouveaux savoir-faire, développer de nouveaux marchés. Par leur connaissance du tissu économique, nos équipes sont en capacité d’évaluer e repreneur Guillaume Verney pendant six mois. la qualité des projets et les perspectives de réussite de la cession. » Un travail mené bien en amont de la cession qui met le dirigeant au centre du dispositif. L’opération de transmission d’entreprise est d’abord et avant tout une question de confiance et d’alchimie entre les personnes.