Reprendre une entreprise : pérenniser une activité !

Lorsque transmettre à ses enfants est compromis, il faut se tourner vers les chambres consulaires.
―© Adobe StockFermer une entreprise encore viable, une hérésie ? C’est pourtant ce qui se passe en France et en Allemagne pour la moitié des cessions d’activités. L’entreprise, ne trouvant pas de repreneur, n’a d’autre solution que de baisser le rideau. Cette situation implique non seulement une perte sèche de savoir-faire, mais aussi le licenciement de personnel, dans le cas où la société emploie des salariés. La fermeture d’entreprises saines a également un impact sur les territoires, avec une baisse de leur attractivité. « Un commerce, un restaurant ou un hôtel qui ferme dans une commune ce n’est jamais neutre » ajoute Marie-Paule Gilardoni, Responsable Cession d’Entreprises à la CCI Alsace Eurométropole. Dans ce type de fermeture, il ne s’agit pas systématiquement d’une question de rentabilité, mais bien de la difficulté à transmettre l’entreprise à un nouveau dirigeant.
La question du coût
Pourquoi est-ce si difficile pour les dirigeants de vendre leur affaire ? « Il peut y avoir une dissonance entre le prix de vente affiché et ce que vaut réellement l’entreprise sur le marché ». C’est d’autant plus vrai, qu’arrivés en fin de carrière, certains dirigeants ralentissent les investissements et ne se dotent pas de nouveaux équipements. Que cela soit en France ou en Allemagne, les potentiels acquéreurs ne se voient pas, en plus du coût d’achat, injecter des sommes importantes dans le renouvellement de matériel. En outre, les récents taux bancaires, encore assez élevés, sont un frein supplémentaire. Par ailleurs, tous les secteurs d’activités ne sont pas logés à la même enseigne. L’hôtellerie-restauration souffre d’un déficit criant de repreneurs. « Volume d’heures important, rythme décalé, aspects règlementaires… Ce secteur présente des contraintes fortes qui peinent à attirer des repreneurs » admet Marie-Paule Gilardoni.
Une pérennité supérieure
La question du coût est ainsi un facteur essentiel dans la reprise d’une entreprise. « Reprendre une société coûte généralement plus cher que d’en créer une. Et c’est bien normal ». En effet, une entreprise déjà en activité possède non seulement des locaux, des équipements et des fournisseurs, mais aussi et surtout une clientèle. En somme, on ne part pas de zéro ! Et les chiffres parlent d’eux-mêmes : le taux de pérennité de 3 à 5 ans est de 70% dans le cadre d’une reprise, contre 50% en création d’entreprise.
Une dimension sentimentale
Mais bien souvent, la fermeture d’entreprises faute de repreneurs est due à un manque de préparation. Beaucoup de dirigeants proches de la retraite ont bien du mal à anticiper, et ne se préoccupent de la cession de leur affaire que trop tardivement. « Il y a évidemment un facteur psycho-émotionnel dans la reprise... A qui vendre ? De quelle manière ? À quel prix ? Ce n’est jamais évident ». La transmission intrafamiliale apparaît comme une solution idéale, mais là encore, le dirigeant se heurte à des freins. La nouvelle génération souhaite désormais tracer son propre chemin, sans forcément poursuivre l’aventure familiale. « Il peut aussi y avoir des conflits dans la famille, des différences de visions, qui empêchent une transmission apaisée » ajoute Marie-Paule Gilardoni. Fort heureusement, les maisons Stoffel, Fortwenger, Naturalvie, Booa, Cuisine Schmitt en Alsace et les sociétés Würth, Liebherr, Burda et Europa-park dans le Bade-Würtemberg nous montrent que cela est possible ! Mais les belles histoires de familles d’entrepreneurs restent à la marge sur le territoire français : seuls 20% des entreprises transmises se réalisent au sein de la famille. Ce qui n’est pas du tout le cas de nos voisins allemands qui enregistrent 65% de transmissions intrafamiliales.
Un travail de matching
Même s’il semble plus facile de transmettre son entreprise à ses enfants du côté allemand, la situation n’est pas pour autant réjouissante. L’Allemagne compte en effet une population vieillissante et une baisse de sa natalité*. Ce sont en tout, selon la Commerzbank, 250 000 entreprises qui sont menacées de fermeture d’ici les 5 prochaines années**. Alors, lorsque transmettre à ses enfants est compromis, comment faire ? « Il faut se tourner vers les chambres consulaires ». Que cela soit en France comme en Allemagne, les experts de la cession-reprise de la CCI et de l’IHK ont pour mission de rechercher et mettre en relation les cédants avec des candidats repreneurs dont le profil a préalablement été qualifié. Des sites Internet spécialisés tels que Opportunet/Transentreprise du côté français ou encore Nexxt-change du côté allemand, recensent toutes les entreprises en quêtes de successeurs. « Et comme souvent, l’anticipation est la clé » martèle Marie-Paule Gilardoni.
Sources :